Interview – Activité Physique Adaptée : bienfaits sur le corps et l’esprit
Tous en Tandem interroge aujourd’hui Nicolas Gueugneau, consultant en santé, sport et motricité, autour de l’Activité Physique Adaptée, une des clef du bien-vieillir, dans le cadre de notre partenariat avec la France Mutualiste.
Un petit mot sur votre parcours ?
Depuis tout jeune, je baigne dans l’univers du sport et de la motricité. J’ai débuté la gymnastique à 6 ans et j’ai pratiqué à un niveau national durant plusieurs années. Concernant mes études, j’ai suivi un cursus en sciences du sport à l’UFR STAPS de Dijon. Ceci correspondait assez bien à ma sensibilité pour l’activité physique . Je suis d’ailleurs allé au bout du parcours universitaire en validant une thèse de doctorat en neurosciences du mouvement en 2008. J’ai ensuite passé une dizaine d’années à faire de la recherche en neurophysiologie humaine entre la France, l’Italie et l’Argentine; où j’ai étudié les liens entre le corps et le cerveau dans le cadre de l’apprentissage moteur. Mais aussi de l’observation du mouvement, ou encore de l’imagerie mentale.
Comment avez-vous découvert l’APA ?
Ce n’est qu’assez récemment – à partir de 2017 – que j’ai commencé à m’intéresser à la relation évidente entre la santé et l’activité physique. Je voyais bien autour de moi qu’après 40/45 ans, certaines personnes qui n’accordaient pas ou peu de place à l’activité physique dans leur vie commençaient à développer des troubles musculo-articulaires ou métaboliques (mal de dos, surpoids, etc.).
D’autre part, j’ai un frère qui, après avoir subi un grave accident de la route, a passé plus d’un an en rééducation; j’ai alors pu mesurer combien la médecine physique et la rééducation par le mouvement étaient importants pour récupérer de certaines lésions musculaires ou nerveuses. Plusieurs facteurs m’ont donc progressivement amené à monter mon entreprise et à développer ma propre pratique libérale en activité physique adaptée, grâce à laquelle j’ai pu aider de nombreuses personnes à se « remettre en mouvement » : des personnes âgées, des jeunes sédentaires, des patients sous chimiothérapie, des femmes après leur accouchement, etc.
Aujourd’hui, je suis maître de conférences à l’UFR STAPS de Besançon et je suis associé à un laboratoire d’ergonomie (ELLIAD-ERCOS),je participe aussi au développement de « Sportnova », une association basée à Chalon-sur-Saône qui met en lien les éducateurs APA avec des personnes atteintes de maladies chroniques (principalement le diabète et les maladies neurodégénératives).

Qu’est-ce que l’activité Physique Adaptée (APA) ? En quoi cela consiste ?
Le concept d’Activité Physique Adaptée se suffit presque à lui-même pour se définir ! Il s’agit de mettre le corps en mouvement en tenant compte des spécificités physiologiques et psychologiques du pratiquant. On sort du cadre sportif (performance,etc) pour ne garder que les aspects musculaires et cardiorespiratoires de l’activité physique. Qui sont alors parfaitement ajustés à l’état du pratiquant. Historiquement, l’APA s’est surtout développé pour permettre aux personnes en situation de handicap de conserver une activité physique. Aujourd’hui, l’APA s’est énormément diversifiée et s’adresse à toutes les tranches d’âges. Et quasiment toutes les conditions de santé : les personnes handicapées, les personnes porteuses d’affections de longue durée. On y retrouve les personnes atteintes de Parkinson, Alzheimer, sclérose en plaques, insuffisances cardiaques, diabètes, maladies psychiatriques, etc.). Mais aussi les personnes sédentaires en bonne santé, les personnes âgées ou en rééducation.
Les séances d’APA insistent sur le renforcement musculaire, le développement et maintien des fonctions cardiorespiratoires, et certaines fonctions nerveuses. On trouvera par exemple du gainage, des étirements légers, ou encore des exercices de coordination et d’équilibre. On utilise du matériel pédagogique (élastiques, medecine-ball) pour permettre aux pratiquants de stimuler leurs capacités dans une ambiance conviviale. Les séances durent entre 45min et 1h et sont conduites par un professionnel (éducateur ou professeur APA diplômé). Elles ont également une fonction socialisante essentielle et permettent de créer du lien social en sortant certaines personnes de l’isolement.
Quels sont les bienfaits reconnus ?
Aujourd’hui, Il y a un large consensus dans la littérature scientifique. Il n’y a plus de débat concernant les bienfaits majeurs de l’APA sur l’ensemble des fonctions physiologiques. Et sur la santé au sens large. Par exemple, en prévention, l’APA diminue le risque ultérieur de développer une maladie neurodégénérative (Parkinson, Alzheimer) jusqu’à 35%. Des études ont montré l’importance d’une pratique physique régulière pour les patients suivant une thérapie contre le cancer;
Ainsi, les patients qui pratiquent de l’APA pendant – et après – leur traitement pharmacologique (chimiothérapie par exemple) diminuent le risque de récidive de plus de 40% pour certains cancers. Enfin, l’activité physique régulière permet de freiner le déclin de nombreuses variables liées à l’âge, comme la sarcopénie (fonte de masse musculaire), l’endurance, ou encore les capacités attentionnelles et de mémorisation. Cet entretien physique régulier permet aux personnes âgées de rester autonome très longtemps, en repoussant significativement l’âge d’entrée dans la dépendance (et bien souvent d’institutionnalisation); les personnes âgées préserveront ainsi leurs capacités fonctionnelles – se faire à manger, sortir, se promener ou faire ses courses – et amélioreront leur qualité de vie.

Comment mettre en place l’APA ? Seul ? Avec un coach ?
Le premier réflexe pour une personne qui souhaite « se remettre en mouvement » est de se rapprocher d’une association sportive pour savoir si celle-ci dispose d’une section APA ou sport-santé. Personnellement, je conseille vigoureusement aux futurs pratiquants ou à leurs proches de se rapprocher d’un médecin (ou d’une association de patient dans le cas des malades chroniques), qui pourra également conseiller et orienter vers des structures adaptées. Il n’est pas conseillé de s’engager seul dans une pratique sportive, surtout si la personne présente des formes de fragilité (maladies chroniques, sédentarité de longue durée, etc.).
Le plus important pour les pratiquants est de prendre du plaisir dans une activité physique régulière, où l’intensité de travail sera parfaitement ajustée aux besoins des différentes populations.
Nicolas Gueugneau, UFR STAPS de Besançon, laboratoire ELLIAD-ERCOS. Directeur scientifique Sportnova.
Liens utiles :
https://espass-bfc.fr/decouvrir/le-pass
https://www.facebook.com/dijongym/